aller au Sommaire

 

DES CHOSES QUI DISPARAISSENT...

 

 

 

 

la disparition de la dictée et de l'orthographe:

Un collègue nous annonce (1999, extrait de forum) :( ma réponse ensuite dans ce dialogue )

Projet de réforme du brevet des collèges:(Epreuve de français, première partie):

"La maîtrise de la langue et de l'orthographe sera évaluée par la réécriture en fonction de différentes contraintes grammaticales d'un passage ou de plusieurs passages du texte initial. Le sujet donne des consignes précises sur les modalités de la reformulation ( modification des formes verbales, changement de l'ordre des mots, de genre, de nombre, etc...) Elles entraînent des transformations orthographiques que le candidat doit effectuer en réécrivant le texte initial".

"Je n'ai jamais été un farouche partisan de la dictée, exercice arbitraire et terrorisant. Mais il ne s'agit plus d'apprentissage : on parle de la délivrance d'un diplôme. Que veut-on ? L'orthographe ne pesait déjà rien (moins de 5% de la note) : ce serait encore ce rien qui empêcherait d'obtenir des résultats dignes du Parti communiste albanais de la belle époque. Pourtant le brevet est déjà si ridicule qu'il était inutile d'en rajouter dans la démagogie. "

Enfin une évidence, mais ô combien hérétique dans notre monde humanitaire qui pousse les enfants à ne savoir ni lire ni écrire sous prétexte que c'est traumatisant et qu'il vaut mieux savoir analyser le schéma actanciel de "la belle au bois dormant"!

Notons qu'on fera encore passer ceux qui défendent orthographe et grammaire pour d'odieux ringards brimeurs d'enfants...(enfants, appelez vite "tamalou", pour nous référer aux affiches abondamment placardées partout sur les murs de nos écoles)

Notons aussi l'abondance des fautes d'orthographe jusque dans des textes officiels d'évaluation de seconde, voire des sujets de brevet ou de bac, voire chez des ministres...

Et si on laissait faire, tous les parents seraient-ils contents d'une écriture phonétique pour leurs enfants?


 

Pour compléter, mentionnons l'évaluation nationale de septembre 99, illisible et truffée de fautes: l'essentiel devait être de conditionner élèves et profs aux nouvelles questions, non de fournir un texte correct, bien corrigé et clair (fautes aussi bien dans le texte que les questions); cette horreur ne mérite pas que je la scanne ici, ça prendrait de la place, mais elle est encore facile à retrouver; quelques collègues ont préféré l'utiliser auprès des élèves en leur faisant rechercher toutes les fautes (plusieurs dizaines) qui s'y trouvaient ; j'ajoute ici mon commentaire, envoyé ici et là :

Bonne rentrée à tous! A l'issue de notre prérentrée, nous avons reçu comme tout le monde les deux fascicules concernant l'évaluation d'entrée en seconde. Inutile de chercher là-dedans de quoi évaluer culture, ni niveau d'expression, connaissances en grammaire, etc, bref, ce qui concernait les évaluations de "jadis" -individuelles alors-il y a quelque dix ans. Ici, juste de quoi nous réasséner le jargon qui entoure les "types de textes", les "relevés d'indices"; on teste un peu la faculté des élèves à s'exprimer dans des tableaux; on nous impose à nouveau, pour bien nous formater, la grille d'évaluation standard, en deux exemplaires sur le cahier de l'élève pour que ce soit bien net. Quelques termes complaisants de franglais (joypad, serial writer) pour probablement "mettre l'enfant au cœur du dispositif"; de l'argot branché ("gore", à mettre dans un tableau de correspondances face à "fantastique"): ainsi, les rares enfants qui auront encore échappé aux jeux vidéo pourront-ils en réclamer d'urgence à leurs parents en signalant que cela leur manquait pour être bien évalués en français et comprendre le texte en question, qui les évoque nommément. Passons sur la pub clandestine et discrète faite à droite de la page pour quelques ouvrages pour jeunes (les autres auteurs seront ravis de la discrimination): il ne s'agissait que d'un "indice" pour comprendre qu'il s'agissait d'un article de journal: c'était donc scientifique.

Signalons la mise en page et la typographie très déficientes de la page(lignes sautées, non alignement des colonnes, majuscules pour les mots coupés en début de colonne, alternance entre guillemets et italique pour les titres, colonnes inachevées : c'est probablement pour montrer à l'élève que le genre "article de journal", c'est n'importe quoi, n'importe comment: bonne pub pour le "Monde de l'éducation" dont cela se prétend un fac-similé; peut-être cela ôtera-t-il à ce journal un peu de sa complaisance pour le pédagogisme...En tous cas, cela ne montre pas une "maîtrise des techniques modernes de communication" chez nos conseilleurs. Enfin, ce texte est truffé de fautes (comme on en voit de plus en plus dans les sujets new-look de bac ou brevet, faits pour leurs auteurs plus que pour les élèves):"quand à", "vraissemblable", le "lecteur" de Stephen King est censé devenir une "lecture" de Maupassant; on parle des "éditeurs jeunesse"; une phrase de pub pour un livre destinés aux jeunes s'est vu amputer de son verbe... Tout ceci pour "évaluer" les élèves !

Voilà plutôt une excellente évaluation des pédagogistes du service de "la programmation et du développement", qu'il s'agisse des auteurs de cette chose, ou s'il y en a, des responsables qui laissent distribuer sans les corriger de telles bourdes, dans leur passion de vouloir nous endoctriner et nous museler.Ou peut-être s'agissait-il de nous montrer quel est le niveau maximum qu'il ne faut pas dépasser, faute d'être un réactionnaire distillant l'ennui dans ses cours par un excès de compétence et de savoirs? On reste perplexe.

Je rappelle qu'une évaluation est obligatoire en seconde , mais pas nécessairement celle-ci; beaucoup de collègues ont continué , comme des grands, à évaluer leurs élèves en fonction de critères moins limitatifs et plus éclairants; et même, en début d'année, ils font souvent l'effort de faire leurs évaluations sans fautes: celles-ci deviendront-elles obligatoires chez le prof "pour se mettre au niveau de l'apprenant"? Nous sommes quelques-uns à pencher cette fois pour une page ajoutée au cahier de l'élève, autour, pour poursuivre dans le style de la chose, de"l'item VIGILANCE FACE A UN TEXTE OFFICIEL DACTYLOGRAPHIE" : "Relevez dans ce sujet toutes les fautes, d'orthographe et grammaire, les oublis, les incohérences, les non-sens, ainsi que les coquilles de typographie." Voilà un excellent exercice qui sera bénéfique pour les élèves et pourrait intéresser les parents quant à la pédagogie et ses scandales:

Combien ces deux cahiers ineptes ont-ils coûté au contribuable? (sept99)

suite de la saga de l'orthographe et de la grammaire (à télécharger), octobre 2000 ; aller voir le même article sur "sauver les lettres " ; ou le voir ici en pdf

(Par parenthèse ,voir dans la pratique( brevet 2000):Un exemple de correction selon les directives officielles : comment on peut avoir 13 sur 20 avec des dizaines de fautes sur un texte de trois lignes.)

 

Voir l'ensemble du dossier brevet


 

J'observais en juin 99 sur un forum la disparition de documents (pardon, leur "classement"), sous le titre "Fahrenheit 451: CNDP, censure, ou négligence?"

Je m'interroge depuis deux ou trois ans sur ce que sont devenus les vieux (certes) documents du CNDP que nous pouvions voir avec les élèves quand nous les commandions il y a une dizaine d'années à nos CDI. Bien sûr, certains étaient obsolètes ou fatigués, (mais auraient pu servir utilement pour de fructueuses comparaisons avec des documents "modernes"). Cependant, j'ai le souvenir de remarquables bobines en 16mm sur Voltaire ou Léonard de Vinci, sur les dessins de Hugo, et aussi d'excellents pièces (Le Mariage de Figaro, Les Femmes Savantes).

Voici deux ans (je ne disposais pas d'internet et n'ai donc pu qu'interroger les services du CNDP, rue d'Ulm et ailleurs), on m'a signalé qu'il était désormais impossible d'obtenir les Femmes savantes de Molière; cette pièce filmée, chaque fois que je l'avais passée aux élèves, les avait enthousiasmés; vieille certes, puisque moi-même j'avais pu la voir comme élève; apparemment disponible en de nombreux exemplaires, puisque j'ai pu la commander -et toujours l'obtenir-, dans tous les établissements où j'ai enseigné- jusqu'au lycée Descartes à Alger. Puis, soudain, plus rien; j'ai appelé tous les services où l'on m'a renvoyé, pour obtenir la même réponse: tous ces vieux films sont "classés", donc impossibles à obtenir: une bibliothèque interdite, en somme, comme dans le "Nom de la rose".

Ne sait on pas copier de tels documents, avec les technologies modernes, s'il ne s'agit que de les protéger? Consolons nous: on m'a alors conseillé la version actuelle (celle qu'on trouve dans tous les Carrefour et Cora du coin); mon établissement a dû l'acheter (plus de 500F à cause des droits) : une horreur; la seule façon de l'exploiter a été de faire chercher aux élèves pourquoi c'était mauvais (acteurs tournant le dos à la caméra, n'articulant pas, faisant des marathons ridicules et injustifiés d'un bout à l'autre de la scène, avec des prestations peu convaincantes. C'est peut-être mon avis de puriste, dira-t-on, ou je voulais voir la pièce "de quand j'étais petit..."

Malheureusement, le résultat est que toutes les classes qui ont visionné cette cassette ont trouvé la pièce ridicule, au lieu de trouver les précieuses ridicules: c'est Molière qui a pris; mais peut-être cela ne dérange-t-il pas trop, en cette période de jargon et de grands mots? Peut-être cela met-il un peu plus nos Trissotins à l'abri? En tous les cas, toutes ces cassettes récentes étant de la même marque, voilà encore du fric qui doit bien aller quelque part, alors qu'auparavant, nous disposions de beaux documents gratuits. Qu'on nous fournisse de nouveaux documents, c'est nécessaire; mais qu'on supprime les anciens me paraît digne de Fahrenheit 451 de Bradbury. A moins que l'un d'entre vous ne dispose de la recette magique pour se procurer encore ces vieux "machins" auprès des services compétents; si oui, merci d'avance de ma la communiquer.

(un an plus tard, je réitère: le commerce gagne, et ce que nos établissements sont désormais obligés d'acheter est consternant; pourquoi n'a-t-on pas le droit de comparer ?

Ceux qui ont une réponse peuvent m'écrire ici

aller au Sommaire

 


 

 

Les élèves qui travaillent et des parents qui s'en occupent:

un père d'élève écrivait sur un forum:


Mon fils élève de 3ème s'ennuie en classe parce que,dit il, il comprend alors que la plupart de ses copains mettent du temps (surtout en maths). Il aimerait en faire plus. Que lui proposer? des cours particuliers avec un répetiteur? des livres ou il trouverait des trucs nouveaux? des sites Internet? Merci de votre réponse.


Aussitôt, chevauchant mon blanc destrier, je surgis avec la réponse: (mai99)
S'il s'ennuie en collège, c'est qu'il n'a pas été suffisamment "socialisé" et qu'il est en mauvaise voie pour la "citoyenneté" ; donc, au goulag ! On peut aussi proposer les nouvelles colonies de vacances : voir le Bafa dernier look, où l'on vous enseigne à coups de lavages de cerveau payants (très cher), que le temps n'est plus aux colos où l'on jouait et s'amusait, mais à la démarche de projet: exemple proposé par la CCAF (EDF): un projet d'animation (pour projet pédagogique intégré dans un projet éducatif): élection de délégués de chambre : objectif: intégrer les règles de vie citoyenne, apprendre le respect de l'autre, et rédiger une charte des comportements !!! C'est pas beau? Ce n'est pas seulement au collège, la "démarche de projet", c'est, -et ce sera-partout! Avec ça, on n'a plus le temps de s'ennuyer !

 

aller au Sommaire


 

Les concours? une mise en garde d'un collègue de fac: à méditer!

Voici un texte d'un collègue enseignant d'université qui tire la sonnette d'alarme concernant les nouvelles modalités des concours de recrutement des enseignants notamment le CAPES.Si les fonctionnaires enseignants sont recrutés SANS GARANTIE SUFFISANTE de compétence sur leur discipline, ce sera la fin de l'école de Jules Ferry. L'Ecole publique laïque et gratuite deviendra un lieu de garde pour enfants remuants sans grande perspective d'avenir. Si vous aussi êtes inquiets, vous pouvez venir le dire à la manif du Jeudi 16 mars à 14h au Luxembourg (Paris).


J'ai atteint, peut être dépassé - car il y a des doutes sur la date exacte de sa naissance - l'âge ou Don Quichotte, ayant décidé de devenir Don Quichotte, s'en fut sur les chemins. Mécontent, moi aussi d'avoir à vivre un nouvel âge de fer et bien que je sois fort sceptique sur un retour à l'âge d'or, j'ai envie d'en découdre. Car je ne supporte plus d'être dans mon métier constamment assiégé par des gens qui ont choisi de "vivre et de penser comme des porcs". En tant qu'universitaire, en tant que citoyen, j'ai bien des griefs à l'égard de Claude Allègre. Inutile d'en faire ici la liste. Ce sont les mêmes que les vôtres.
L'objet immédiat de ma colère est cependant plus précis. Il s'agit du plan de cadrage sur la formation des enseignants rendu public par le Ministère le 7 février dernier. Un faux rapport signé par Bernard Alluin et Bernard Cornu préconise des mesures qui correspondent point par point, et jusque dans les plus minuscules détails, à un projet de réforme des Capes vieux de deux ans et concocté dans le secret des "tables-rondes" ministérielles. Les comptes rendus n'en ont jamais été rendus publics. Nous nous les étions procurés à l'époque d'une façon pas très honnête. Mais comment faire autrement avec les Machiavel au petit pied et les Clausewitz de pacotille qui dressent leurs plans de campagne dans les boudoirs du Cabinet? Nous publierons ces textes.
Tout le monde pourra alors constater que l'actuel plan de cadrage, qu'on nous présente comme une nouveauté, fruit des longues cogitations de deux experts, et celui qui fut proposé par les Directeurs d'IUFM en 1998 se ressemblent comme deux gouttes d'eau. C'est pourquoi je parle de faux rapport. Alluin et Cornu, respectivement Ancien Président de l'Université de Lille et Directeur de l'IUFM de Grenoble, se sont contentés de cautionner par leur signature un plan déjà bien ficelé et livré clés en main. Le premier, un géographe autrefois respectable, s'est sali les mains et son déshonneur personnel retombe, malgré que nous en ayons, sur tous les universitaires de ce pays. Quant au second, il n'avait plus rien à perdre car être aujourd'hui Directeur d'IUFM est suffisante marque d'infamie. Ayant pris tous deux le parti de la servitude volontaire, ils rendent hommage au Ministre-Ubu en lui baisant les bottes. Grand bien leur fasse.
Mais nous sommes de plus en plus nombreux dans les Facs à penser que la vertu de courage et la liberté de l'esprit valent plus que la souplesse de l'échine. Et c'est sans doute pourquoi Allègre a utilisé pour ses basses oeuvres un ancien Président d'Université : tous les Présidents en exercice ont dû se défiler par crainte de ne pas pouvoir aller jusqu'au bout de leur mandat. Une Initiative pour les Assises de l'Enseignement public va être lancée dès que nous aurons un nombre suffisant de premiers signataires. Je dois me réunir mercredi prochain avec deux collègues de Lettres modernes pour mettre au point le texte d'un Appel à la désobéissance des enseignants du Supérieur.
Pourquoi tout ce remue-ménage? La réforme du Capes est la clé de voûte de toutes les réformes. Pour appliquer les mesures du rapport Bancel - travail d'équipe, TPE, ICJS et autres gadgets qui vous empoisonnent l'existence - il faut des professeurs dociles : avec les pouvoirs exorbitants qu'on va leur donner, les IUFM se chargeront de les formater. Il faut aussi des ignorants, incapables d'enseigner quoi que ce soit, eussent-ils la volonté de le faire. Le nouveau Capes se chargera de sélectionner des professeurs ignorants. Les premiers recrutés seront en poste jusque vers 2040. Ils noieront peu à peu sous leur masse les résistants que vous êtes. C'est pourquoi il est si urgent d'agir.
Le Capes cesse d'être un concours national. L'écrit se passe fin janvier / début février. C'est un écrit sans programme ou plutôt centré sur les programmes du secondaire : plus de littérature et de civilisation en langues puisque cela ne fait pas partie des programmes du secondaire, plus de latin ou de langue vivante en Lettres modernes puisque cela ne fait pas partie des programmes du secondaire. Ira-t-on jusqu'à supprimer le grec en Lettres classiques, puisque il n'y a désormais plus de place pour le Grec dans nos collèges et lycées ? Quant aux professeurs de mathématiques, ils devront sans doute apprendre à reconnaître les triangles "de même forme", à définir les fonctions continues à partir des données discrètes d'un tableur et autres joyeusetés. N'oublions pas surtout pas les professeurs de SVT qui devront, eux, étudier en détail l'explosion de la Soufrière telle qu'elle aurait dû avoir lieu selon les ordinateurs du Gros. Et ainsi de suite au gré des disciplines.
L'oral, lui, entièrement pédagogisé, se passera en juin au sein des IUFM après quatre mois de lavage de cerveau. Ceux qui montreraient encore quelque velléité de résistance seront impitoyablement écartés. Car cet oral-là est explicitement conçu comme un entretien d'embauche dans le privé. C'est que cessant d'être un concours de recrutement, le Capes est désormais conçu - je cite littéralement le texte - comme "la première phase d'un processus d'embauche". Le but poursuivi avec obstination depuis plus de dix ans sera enfin atteint. Les professeurs n'en sauront pas plus que leurs élèves. Et tout le monde réussira puisque quand plus personne ne saura rien, tout le monde saura tout. La logique du projet, on le voit, est imparable.
Je ne veux pas insister sur les conséquences de ce plan pour le secondaire. Vous les voyez aussi bien que moi. Mieux que moi. Mais l'Université ne sortira pas indemne, elle non plus. Les pédagogues rongent leur frein depuis dix ans parce que leur blabla n'a toujours pas réussi à pénétrer dans les Amphis. Ce sera bientôt chose faite.Tous les cursus universitaires sont mis sous le contrôle des grenouilles envieuses de la pédagogie. Nous devrons introduire des modules de pré-professionnalisation en DEUG et en Licence si nous voulons que nos étudiants aient des chances d'être admis dans les IUFM. Quant aux cursus post-licence, ils vont être contaminés par la préparation de cet écrit innomable, de niveau Bac+Bac.
Mais ce n'est pas fini. L'Université est chargée de "l'accompagnement de l'échec" - je n'invente rien, c'est, là encore, l'expression littérale employée par les auteurs du rapport : il faudra donc accompagner l'échec comme on accompagne un mourant puisqu'aussi bien on transforme les Universités en mouroirs. Car tout le monde doit réussir, même ceux qui échouent. On connaissait déjà le droit à la réussite. On nous propose maintenant un nouveau concept : la réussite malgré l'échec. Que faire en effet des étudiants inscrits à l'IUFM et qui ne seront pas admissibles en février ? On ne peut les jeter à la rue en plein milieu d'année. Qu'à cela ne tienne. Les concepteurs de l'entreprise "Réforme and Co" ont trouvé la solution. On renvoie les déboutés de l'IUFM à la Fac, sommée de valider l'échec à l'écrit comme premier semestre de maîtrise. Ceux qui n'auront pas été admissibles au Capes feront donc une maîtrise. Une maitrise pourquoi faire ? Pour passer l'agrégation? Pour commencer une thèse ? On continue la politique imbécile qui a, depuis longtemps, les faveurs du Prince : pousser vers le haut ceux qui n'auront pas été capables de réussir à un niveau inférieur.
C'est donc l'ensemble des cursus universitaires qui va être affecté par ce plan. Depuis le DEUG jusqu'à la maîtrise et au DEA. Car j'oubliais de dire qu'il est aussi prévu que les stagiaires IUFM recoivent le grade de mastaire, l'équivalent de l'actuel DEA. Au nom de quoi un stage professionnel pourrait-il être considéré comme l'équivalent d'un travail approfondi de recherche ? Peu importe. Tout doit passer sous la coupe des professionnels de la professionnalisation, depuis la maternelle jusqu'au Collège de France. J'aimerais pour conclure donner la parole à Jacques Roubaud qui disait dernièrement : "Il n'y a pas beaucoup de poésie dans les têtes". Comme pour confirmer ce constat, le Bouffon déclarait à Tokyo : "L'an dernier, à peine y avait-il 500 personnes manifestant contre moi que cela faisait la une des journaux. Maintenant il n'y a plus personne dans la rue, je vais finir par provoquer des manifs pour qu'on parle de moi. Et pourquoi plus de mouvements de ce genre? Parce que j'ai tout dégagé à la Kalatchnikov. " Et il ajoutait, comme les journalistes évoquaient un changement de portefeuille entre Martine Aubry et lui-même : "Comme j'ai chloroformé les enseignants, si un jour elle vient à l'Éducation, ça pourrait les réveiller".
Nous ne nous battons malheureusement pas contre des moulins à vent ou des géants de pacotille. Nos ennemis sont puissants, ils ont pris le pouvoir à tous les échelons de l'Éducation nationale depuis les anciennes écoles normales, devenues IUFM, jusqu'au Ministère lui-même. Raison de plus pour être lucides, résolus et courageux. Il faut montrer au Terminator de la rue de Grenelle que nous ne reculerons pas devant ses Kalatchnikov et qu'en croyant nous avoir chloroformés, il est aussi près de la vérité que, lorsque pris de démangeaisons devant l'oeuvre de Galilée, il s'amuse avec ses boules. Lui qui ne croit qu'à l'expérience et qui aime tant mettre la main... à la pâte devrait démontrer le caractère négligeable de la résistance de l'air en sautant sans parachute lors de son prochain voyage à Tokyo. Dernier mot donc : j'espère que, pour respecter les traditions du lieu, il y a ici un agent des RG chargé d'enregistrer tout ce qui se dit. Je lui demande de transmettre personnellement à Claude Allègre cette invitation de ma part. Nous espérons tous qu'il ne ratera pas cette occasion de faire une belle expérience de physique amusante.


Pedro Cordoba, Co-directeur du Département de Langues romanes de l'Université de Reims.

 

aller au Sommaire

 


 

 

La disparition des SVT? (pétition de profs de SVT, 6 avril 00)

 

Suite aux diverses informations qui nous sont parvenues au sujet des nouveaux programmes applicables à la rentrée de septembre 2000, après lecture des compléments et audition des rapporteurs, les professeurs, sous- signés, de Sciences de la Vie et de la Terre émettent les réserves, réflexions et critiques suivantes, afin d'en porter connaissance aux autres collègues, APBG, Inspection, GTD...

Le premier point à signaler est une diminution notoire de la démarche expérimentale au profit d'un saupoudrage tous azimuts. Le programme se résume en une succession de flashs sur trop de différents domaines des SVT, sans assurer de bases suffisamment solides pour une maîtrise de notions essentielles, le tout accompagné de nombreuses " boites noires " intraitables ou réservées à des années ultérieures.

Doit-on aborder avec les élèves uniquement des mots à la mode, comme le fait avec plus ou moins de brio la télévision (mais avec d'autres moyens que ceux de l'Education Nationale) ? Doit-on leur fournir une culture générale superficielle "touche à tout" ? (des systèmes comme Internet sont déjà en place pour cela !)

Doit-on arrêter d'aider les élèves à développer leurs capacités de réflexion et de raisonnement ainsi que leur esprit critique, nécessaires pour devenir des citoyens conscients ?

Nous doutons vraiment du fait qu'une culture scientifique acquise par flashs permette à tout élève de pouvoir lire un article quelconque. Tout ce qui nous est présenté actuellement nous montre une inadéquation notoire entre le choix pédagogique affiché du GTD -" un enseignement expérimental basé sur des activités pratiques " - et le contenu du programme proposé qui en fait ne nous permet, quoiqu'en disent ceux qui le soutiennent, que peu d'activités expérimentales. Ceci est surtout flagrant avec les thèmes 1 et 3.

Les activités pratiques proposées reposent plus sur de simples observations, parfois manipulatoires certes, parfois quantifiées, mais le plus souvent basé sur l'utilisation de supports papier, vidéo ou documentaire. Cela peut certainement plaire à quelques élèves. Mais où est le concret, la " main à la pâte ", qui bien souvent fait l'apanage de notre enseignement. Où sont les expériences, le contact avec le réel de la Vie, de la Terre qui font notre spécificité ?

Nous en arrivons à nous demander laquelle est la plus rétrograde : notre manière de concevoir notre enseignement ou celle du G.T.D. ? Ce fait va d'ailleurs plus loin : que penser de la motivation des élèves devant certaines activités proposées ? Ne citons que l'exemple du cour d'escargot, qui est si caricatural, ou celui de l'embryon de poulet, pour expliquer l'automatisme cardiaque (pourquoi pas celui de l'huître ou de l'ascidie ?)

D'autres nous paraissent totalement irresponsables (mutations de levures) ou irréalisables (utilisation de rayons UV).

Que dire aussi du démontage et de " l'expérimentation " sur l'ADN et sur le génome alors que nos élèves de seconde n'ont pas les bases atomiques ou moléculaires.

Nous rappelons que notre public est un public d'élèves et non d'étudiants ou de chercheurs, que nous sommes dans des établissements scolaires et que nous n'avons ni la vocation ni les moyens de fonctionner comme des laboratoires de recherche.

La dernière critique que nous pourrions faire est celle de ne pas connaître les objectifs des futures classes de première et de terminale : appliquer un programme sans connaître la suite qui lui sera donnée nous semble pédagogiquement illusoire. Pour de nombreux élèves, la biologie ne s'arrête pas à la fin de la seconde, à moins que notre disparition ne soit programmée en coulisse, et nous ressentons donc une certaine amertume dans le fait qu'il nous soit demandé d'appliquer ainsi de nouveaux programmes. Pédagogiquement vôtres.

Des enseignants de SVT Signez cette lettre sur : www.multimania.com/mauvaisherbe


Sur le "Lagarde et Michard":

( et pour lire un beau texte drôle sur le sujet, ne loupez pas ceci )

Le 22/10/03

Lettre au courrier des lecteurs de "Marianne", suite à un article la semaine précédente sur le sujet
(envoyé par mail et par courrier)


(après lecture de vos pages sur le "Lagarde et Michard")


Le sujet est bien long à traiter, je sais que vos colonnes sont limitées…
Je m'étonne cependant, ayant lu chez vous bien des articles incisifs sur le jargon et les manies de l'Education nationale, que vous laissiez dire si vite, et avec une certaine condescendance amusée face à une pièce de musée attendrissante, que le Lagarde et Michard est devenu quasi inutilisable et rétro vu les programmes, comme si c'était un argument pour le déclarer obsolète. On semble déclarer que c'est une bonne chose qu'on l'ait réédité pour faire plaisir aux nostalgiques de leur jeunesse.


Je précise que, quand j'étais élève, il était déjà ancien, et que j'avais d'autres manuels, afin de parer au reproche de sentimentalisme (quelle honte !…)


Mais les sacro-saints (et si fluctuants) programmes sont-ils devenus supérieurs à toute forme d'histoire de la littérature, et doivent-ils même l'éliminer?


Je dois donc vous préciser que nous sommes plusieurs à l'utiliser à nouveau dans notre lycée, en parvenant cependant à nous adapter à ces programmes - malgré leur prétention et leur pauvreté : on peut trouver dans ces manuels largement assez de textes pour illustrer les indigents "objets d'étude" proposés au bac, pourvu qu'ensuite le prof fasse son travail. Il s'agit pour nous de lutter contre la mode qui sévit depuis plus de dix ans des manuels "jetables", adaptés à chaque mouture des programmes, aux nouveaux noms ou types d'exercices, et donc parfaits pour les lobbies de l'édition et de la formation, puisqu'à chaque fois qu'on change un mot, ou qu'on en change le sens au nom des ukazes de la linguistique et de la critique universitaire modernes (ou du jargon des IUFM), on jette un livre pour passer au suivant : pauvres auteurs alibis qui y séjournaient!


Je ne suis pas pour autant en train de courir après mon passé en utilisant un tel livre avec mes élèves. J'en discerne bien certaines lacunes, mais mineures selon moi par rapport aux tares des ouvrages actuels, qui cherchent à formater plus qu'à cultiver les élèves. De quoi ont-ils besoin? D'un manuel : c'est-à-dire d'un livre qu'on manie, avec la main! On finit alors par comprendre l'évidence oubliée que ce qui est au début est plus ancien que ce qui est à la fin (ma génération l'a appris dès l'école primaire). Le manuel ne devrait pas être pas un fourre-tout où l'on colle Rousseau à côté de Duras au nom de l'autobiographie ou, plus récemment du"biographique" (l'adjectif est devenu un nom) : il ne s'agit pas, au nom de n'importe quel "thème", ou sujet à la mode, ou du "croisement de textes", de faire se côtoyer les auteurs les plus hétéroclites, quitte à ce que les élèves finissent par tout mélanger .


Je crois nécessaire que les élèves, au bac, au lieu de dire "Ben, dans ces deux textes, de Chateaubriand et de Sartre, les deux auteurs racontent leur vie", et d'être incapables de les situer même dans un siècle, puissent, à l'aide de leur travail personnel sur leur manuel, situer ces auteurs dans une époque, lier le texte à d'autres du même auteur ; il faut qu'une recherche personnelle leur soit possible hors d'un cadre rigide et imposé. Bref, il faut que cessent une ignorance et une confusion dont les pauvres élèves ne sont pas responsables, mais qui sont entretenues par le technicisme et le jargon . Au nom de l'égalitarisme et des problématiques fumeuses, on évacue toute histoire de la littérature des manuels, et le nouveau vocabulaire est devenu hermétique à n'importe quel parent d'élève qui se croyait encore "bon en français ou en littérature" jadis et devient incapable de comprendre des questions de français dès la sixième.


Vous qui dénoncez les intérêts financiers en jeu un peu partout, devriez dénoncer cela un peu plus lucidement ou fermement : bien sûr, un "Lagarde et Michard", ce n'est pas rentable : cela risquerait de se vendre de classe en classe , d'occasion (et encore, bien des gens ont préféré les conserver); remarquons qu'avant la réédition, certains commençaient à se vendre très cher, alors que les manuels actuels se jettent par tonnes…En ce qui me concerne, j'en jette des dizaines par an, que les éditeurs m'envoient chaque année, mais qui ne me sont d'aucune utilité, même à moi comme prof, tellement ils sont confus.Ils ont juste l'avantage de s'adapter au vocabulaire du jour, par exemple de donner au mot "registre" un sens totalement différent de celui qu'ils donnaient trois ans auparavant, mais qui correspond au dernier programme: ainsi, ils se rendent indispensables, croit-on, pour la réussite au bac! Mais ce changement constant du sens des mots me rappelle plutôt 1984 d'Orwell!


Cela dit, je ne suis pas un fou du "Lagarde". Je trouvais un manuel postérieur (le "Chassang et Senninger", chez Hachette) plus moderne, plus riche en textes, et mieux mis en page. Mais, quand je l'ai réclamé cette année chez Hachette, on m'a dit qu'il était définitivement épuisé. Intérêt un peu gourmand et effrayé chez le commercial que j'ai eu au bout du fil quand je lui ai dit que nous aurions été plusieurs profs à le faire acheter pour des classes de plus de trente élèves, dans un seul bahut! C'était presque "Vous êtes sûr? Ah, si on avait su …". Le Lagarde a été réédité, les autres non : on a fait le choix du commercial (intérêt des éditeurs et des profs qui gravitent dans ce milieu. La mode du jetable perdure. (Il est vrai que ces livres-là sont abondamment pourvus d'un "livre du maître" qui appâte certains enseignants et les pousse à faire du conforme prédigéré…)


Bref, depuis trente ans que j'enseigne, j'ai vu les manuels chronologiques sérieux (citons par exemple ceux de H.Mitterrand, malgré une ambition peut-être excessive et une mise en page un peu trop dense et confuse, mais très riches) attaqués régulièrement par la vogue du "thématique", des manuels par "genres", et maintenant par"séquences" et "objets d'étude", asservis à des programmes qui durent à peine quelques années : livres qui ne transmettront rien, puisqu'ils vivent dans l'instant; livres qui ne peuvent servir de référence au-delà du programme d'une année; livres qu'on ne garde pas, qu'on ne fréquentera plus ; livres où les élèves ne lisent rien en dehors des trente textes de leur liste de bac: contrairement aux "vieux" Lagarde qui leur survivront…


Je ne suis pourtant pas opposé aux confrontations de textes: mais cela, ce n'est pas aux manuels de l'imposer.Un manuel ne doit être qu'une base de données, sur laquelle prof ou élèves travaillent, et non un ouvrage confus dans lequel les uns et les autres peinent à se repérer en y constatant des vides autrement graves que ceux que les détracteurs du Lagarde se plaisent à dénoncer. Aux profs, aux élèves, voire aux parents (et tant mieux si les générations peuvent s'y côtoyer, c'est positif), d'y piocher , d'y comparer idées et langages.
Sinon, au nom d'un technicisme dangereux, on détruit une culture aussi sûrement que ceux qui ont brûlé naguère les livres. Il est dommage que les quelques critiques des naïfs défauts des Lagarde et Michard (qui n'ont jamais eu l'ambition de devenir des ouvrages universitaires –mais finissent par en devenir par la faute des nouveaux) n'en entraînent pas de bien plus virulentes sur les beaucoup moins naïfs-et beaucoup plus idéologiques et mercantiles- manuels modernes.


Au fond, que reprochent les hypocrites au Lagarde et Michard? Que, dans ces manuels, il n'y ait pas tout ; moyennant quoi, on vend des manuels où il n'y a rien!


J'ai bien sûr été sûrement trop long pour un "courrier des lecteurs".Je garderai cependant une copie de cette lettre sur mon site et en enverrai une à "sauver les lettres" dont je suis membre. Merci de votre attention,


Alain Talé, Prof. Agr. de Lettres Classiques.

22/10/03 : (Courrier envoyé au courrier des Lecteurs de "Marianne" suite à leurs articles sur le sujet, encore, du "Lagarde et Michard.) Même texte à télécharger en PDF. Précisons qu'en janvier 04, je n'ai pas eu la moindre réponse trois mois après leur article : ce qui me fait penser que, prônant constamment la critique du "politiquement correct", ils ont cependant (aimant jouer sur tous les tableaux ) cédé à la facilité d'un article à la fois flatteur, condescendant et amusé sur le "Lagarde et Michard", mais restent incapables de dénoncer plus qu'épisodiquement ou de façon anecdotique et limitée, bien que spectaculaire sur le moment, les vrais responsables : ménageant la chèvre et le chou, ils flattent un peu les dinosaures,tout en faisant sentir leur côté jurassique, mais n'ont pas l'énergie de dénoncer trop longtemps les vrais responsables, qui peut-être sont aussi des lecteurs...C'est le danger de courir plusieurs lièvres à la fois...

(et lisez- ce n'est pas de moi, mais bien meilleur: "de l'horrible danger du Lagmiche")


 

POUR FEUILLETER QUELQUES AUTRES SUJETS ABORDÉS :

Le bac , le brevet , le mythe du travail collectif , les disparitions insidieuses ( orthographe, grammaire, concours, documents, travail, svt , Lagarde et Michard, etc...) , les sempiternels nouveaux exercices-gadgets (modules, recherche par internet, groupements de textes et autres "corpus", TPE etc) , le "grand débat" , les dangers d'une certaine utilisation d'internet pour tricher, et surtout pour remplacer l'école ou la vendre , le jargon à l'école , le latin et le grec, le problème du gâchis de la lecture en primaire (lien vers un autre site), les changements de manuels et d'exercices , le métier contre le pédagogisme , textes récents sur le pédagogisme, poésie , les profs à la casse , les changements de programmes constants, cliquez sur ces titres avant de vous noyer dans mon désordre artisanal. Sinon, tentez le sommaire...

aller au Sommaire

Retour à la page d'accueil du site