Après Allègre:

Une chance pour la transformation démocratique de l'école par Samuel Johsua et Jean-Yves Rochex (le Monde, 10 avril)

Quelques extraits :

EVIDENTE depuis longtemps pour les observateurs attentifs du système éducatif, la défaite de Claude Allègre est aujourd'hui consommée. Jamais ministre n'aura concentré sur sa politique et sur sa personne autant de colère et de ressentiment, à la hauteur de la suffisance et du mépris qu'il s'est plu à afficher à l'égard des enseignants, des personnels de l'éducation nationale et de leurs syndicats, comme du débat public en matière de politique éducative.

On aurait tort de ne voir là que questions de méthode. Jusqu'au bout, face à la révolte enseignante, M. Allègre a cherché à convaincre l'opinion que les réformes qu'il avait engagées étaient à la fois indispensables et les seules possibles. Mais la politique menée pendant trois ans a été, au contraire, marquée du sceau de la régression, de l'évitement des questions de fond et de l'incohérence, au-delà des effets d'annonce et des coups de menton. Dès lors, les difficultés ne pouvaient que s'aggraver. Ainsi en est-il de la réforme des lycées : les nouvelles mesures augmentent les difficultés de réaliser les apprentissages anciens, alors que la manière d'aborder les nouveaux est tout sauf claire. (…) Au primaire, « La charte pour l'école du XXIe siècle » ne soulève que le scepticisme, puisque l'essentiel des efforts (et des moyens) du ministère sont en fait destinés à favoriser ce qui est lié aux « améliorations du comportement », alors que le souci proclamé publiquement est « la lutte contre l'échec scolaire », et que les études officielles elles-mêmes montrent amplement que les ZEP qui réussissent le mieux vis-à-vis de cet objectif sont celles qui, contre vents et marées, sont restées attachées à leur mission d'aider aux apprentissages de fond.

D'une manière générale, ce qui domine la politique ministérielle est l'idée que, si les élèves sont en difficulté, c'est parce qu'on voudrait trop leur apprendre. La « solution » est alors cherchée du côté de « l'allégement des programmes » couplé, pour les pauvres, à une éducation à la citoyenneté sans contenus et à forte visée moralisatrice et pacificatrice, sans que soient réellement interrogés les contenus disciplinaires, ni leurs modes de choix, d'organisation et d'enseignement. La confusion est maintenue sur la nature des missions du système éducatif.

Le bilan de l'agitation ministérielle est que l'incohérence sur ce point a été renforcée, puisque les missions anciennes ne sont officiellement pas abandonnées, mais que s'y ajoutent une multitude de nouvelles. Le système éducatif sort donc nettement plus fragilisé des premières années de gouvernement de la gauche plurielle. (…)

Que ces contre-réformes soient mises en échec est une nécessité pour ouvrir la voie à une nouvelle réflexion de fond. L'échec de Claude Allègre ne doit pas conduire au maintien du statu quo dont personne ne peut se satisfaire. Car l'école a besoin d'un changement profond pour être moins inégalitaire, plus en phase avec les besoins de connaissance nouveaux qui se font jour, plus à même de mener plus d'élèves vers une maîtrise d'outils intellectuels d'une haute exigence. Méfions-nous du retour triomphant de l'élitisme, les yeux tournés vers un passé mythifié (fût-il masqué sous l'étiquette « républicaine ») et qui cherche à imposer le renoncement au difficile espoir de l'école pour tous ! Et sans aucune considération pour les difficultés crées par l'explosion libérale (chômage, déchirures sociales) dont l'école actuelle ne porte pas la responsabilité.

Il y a là plus qu'une simple question de techniques pédagogiques (« innovatrices » ou « « traditionnelles »), mais un choix dont il convient de rehausser le caractère profondément politique. Oui ou non, la puissance politique va-t-elle s'engager sur une culture commune pour tous, pour les élèves de Saint-Denis comme pour ceux de Neuilly ? Oui ou non, va-t-elle abandonner la cassure de l'école, avec une pauvre école pour les pauvres ? (…) L'échec de Claude Allègre est une occasion qui ne se répétera pas de sitôt d'engager la discussion pour refonder un pacte entre la société et son école, dans une perspective de démocratisation effective. La laisser passer serait plus qu'une erreur, une véritable faute insultant l'avenir.

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Après Allègre: modifications ou suppression des réformes?

Informations obtenues lors du stage de formation sur les nouveaux programmes de 2nde , à Madrid, les 5 et 6 Avril, auprès de M. Jordy, I.P.R. - I.A. de Lettres à Toulouse.


1) L'aide individualisée : Elle n'est pas remise en cause pour l'année qui vient , mais on pourrait revenir aux horaires disciplinaires antérieurs. Pendant l'année de transition 2000/2001, les lycées pourraient avoir la liberté d'utiliser à leur gré les deux heures d'aide individualisée y compris pour les réaffecter à l'horaire disciplinaire ; (mais faut-il souhaiter qu'une telle situation se pérennise, car c'est rompre avec le principe du même horaire disciplinaire dans tous les établissements ? Ce serait introduire ce qui se pratique déjà au collège : les horaires-planchers.)


2) Les T.P.E : Ils semblent reportés…L'année prochaine, il y aurait extension de leur expérimentation à l'issue de laquelle une décision serait prise…(Mais que fait-on des heures de la D.H.G allouées d'ores et déjà pour les T.P.E ? Les réintroduire dans l'horaire disciplinaire ?)


3) Le Français : L'option " Littérature " est bel et bien supprimée. L' horaire de l'enseignement obligatoire de Lettres en Terminale passera à 4 heures, dans deux ans. L'E.A.F. : Le principe d'une épreuve écrite et d'une épreuve orale est réaffirmé pour toutes les séries. La possibilité du contrôle continu ou du contrôle en cours de formation est désormais exclue. (L'épreuve orale liée aux T.P.E. était sur le point de remplacer l'oral de l'E.A.F. ) L' oral de l'E.A.F . : la liste est abandonnée ; l'élève a le choix entre deux textes ; il a 40 minutes de préparation ; l'entretien s'appuie sur le travail effectué par l'élève en classe dont l'examinateur prend connaissance à partir d'une liste. L'écrit de l'E.A.F. : 3 épreuves au choix : - un commentaire de texte ; (nous devons faire pression pour qu'il se maintienne sous forme de composition) - une " réflexion littéraire " sur un problème littéraire ou une œuvre ; (nous devons faire pression pour maintenir la forme de la dissertation ; un problème se pose puisque le programme tel qu'il existe actuellement disparaîtrait.) - un exercice d'écriture personnelle à partir d'un texte-support ; (il s'agirait par ailleurs de rendre l'élève conscient des procédés d'écriture par lui utilisés) ; (nous devons faire pression pour que cet exercice n'existe pas en tant qu'évaluation finale ) - N.B. Si le G.T.D ne parvient pas à imposer ce sujet d'invention, il pourrait remettre sa démission. A bon entendeur….


4) Le nouveau-nouveau programme de Seconde : On ne sait pas s'il rentrera en application à la rentrée 2000 ( c'est peu probable ; serait en expérimentation) ; il serait allégé par rapport à son état actuel, par l'introduction de " ou " entre certaines rubriques. Toutes le problématiques conseillées ( ex : étude des mœurs pour la comédie, débat sur l'éducation pour l'argumentation) disparaissent.


5) Le nouveau programme de Première : Paralysie actuelle du G.T.D : En l'état actuel : - étude de la poésie (au choix du professeur entre le XVI¼ et le XX¼) ; -étude d'un mouvement littéraire français et européen au choix entre le XVI¼ et le XVIII¼ ; - réécriture de textes ; - étude de la délibération à travers l'essai et le dialogue . En outre, le professeur devra, en fonction de la série, choisir un certain nombre de rubriques parmi : - " écrire, lire et publier " , du XVII¼ au XIX¼ ; - " Le biographique " ; " L'épistolaire " ; " L'apologue " . Proposition d'une maquette pour l'écrit de l'EAF : Principes directeurs : - souci d'équilibre entre les 3 sujets : pour chaque sujet, 2 questions sur 4 ou 5 points et le corps du sujet sur 16 ou 15 points ; - sauver la dissertation et le commentaire de texte ; - permettre à l'élève l'exercice de l'écriture personnelle sous forme argumentative. NB : L'écriture de type narratif, recommandable à titre de pratique au cours de l'année scolaire pour ses aspects inventifs et ludiques, présente plusieurs inconvénients, si envisagée comme épreuve de baccalauréat : difficultés certaines d'évaluation, risques de subjectivité ; exercice déjà pratiqué en collège, et à ce titre peu novateur pour un lycéen ; risque certain de déséquilibre entre les 3 sujets, au détriment des deux autres. Premier sujet : Texte argumentatif : - 2 questions préalables visant à éclaircir ou préciser la compréhension du texte ; - un travail d'écriture invitant l'élève à entrer dans la problématique du texte. La forme choisie par l'élève serait entièrement libre, l'inventaire des formes argumentatives possibles ayant été objet d'étude au cours de la formation de l'élève (ex : dialogue, discussion, plaidoyer, réquisitoire, chronique…). Le travail serait évalué selon les critères classiques : richesse du contenu, pertinence des exemples, qualité de la langue, cohérence de la composition, pertinence et originalité de la forme choisie. Nous sommes ici sensibles au souci de permettre, valoriser et développer chez l'élève l'exercice de l'écriture personnelle, laquelle peut autant se concrétiser dans les situations ordinaires de la vie quotidienne, que susciter le goût de l'écriture de fiction. Deuxième sujet : Commentaire de texte : le modèle actuel nous paraît satisfaisant, à ceci près que les questions préalables devraient porter sur des aspects stylistiques, traditionnellement ignorés, oubliés, négligés par l'élève dans le corps du commentaire. Troisième sujet : Dissertation littéraire : il nous a paru nécessaire que le sujet porte sur un programme, car il est essentiel que l'élève perçoive un lien clair entre le savoir acquis dans l'année et l'épreuve terminale. Vu la redéfinition des programmes, il faudrait donc imaginer que le Ministère décrète annuellement (un peu sur le modèle actuel) quels seront les thèmes ou les aspects du programme sur lesquels la dissertation pourra porter. 2 questions préalables sur 4 ou 5 points, l'une visant à expliciter les termes du sujet (mot-clé, polysémie…), l'autre demandant à l'élève de préciser la problématique du sujet. Rappelons que le corps du sujet ne fait l'objet d'aucune exigence formelle définie a priori, autre que la clarté et la cohérence de la composition. Nous reprenons en ceci le cadre et les termes à l'intérieur desquels les textes officiels ont depuis toujours situé l'exercice.


Cette maquette, proposée par des professeurs de Lettres de Madrid et de Lisbonne, paraît avoir rencontré l'approbation de la majorité des stagiaires lors de la rencontre madrilène organisée par M. Jordy.

 


 

 

 

Vigilance!

 

(mi-avril 2000) N'oublions pas que le dernier ministre n'a fait que poursuivre l'"œuvre" des précédents, que le "nouveau" ministre a déjà été un "ancien" ministre de l'éducation, et que tout cela procède d'une politique européenne, voire mondiale. N'oublions pas surtout que ce sont plutôt les hauts fonctionnaires du ministère , et non les ministres, qui font la politique de l'éducation. N'oublions pas que les IUFM restent leur moyen privilégié d'endoctriner, ou de menacer, les nouveaux profs à venir : le débat n'y règne guère...

Restons vigilants, les casseurs sont toujours là et au pouvoir! Ils savent fort bien faire profil bas et réapparaître à travers de nouveaux rapports, de nouvelles directives, le jour où on les a oubliés; et ils trompent encore beaucoup de médias, de parents, ...et même de profs, à travers un vocabulaire pétri de bons sentiments. Attention aux tartuffes et à la nouvelle "cabale des dévôts"!



 

Juin 2001: Bien sûr, comme on pouvait s'y attendre, Lang n'a rien fait de plus que son prédécesseur (lequel se pavane maintenant constamment à la télévision en tant que donneur de leçons de modernisme à tous ceux qui n'ont pas compris qu'il était un pionnier, lui qui n'a rien fait contre ce qu'il dénonce maintenant avec tant de courage); les gurus ont toujours le pouvoir, la réforme avance, puisque devant tous ses échecs, ses tenants qui occupent le ministère réel n'ont d'autre discours à tenir que de dire qu'on n'est pas allé assez loin pour que cela marche bien! Ils ne s'arrêteront que quand tout se sera écroulé... Gageons qu'alors ils se seront recyclés- qui sait, dans un enseignement payant? Gageons aussi qu'ils mettent leurs propres enfants bien à l'abri des monstruosités qu'ils sécrètent pour les autres...

Bref, sous Lang:

"Nouveau bac" (celui qui était prévu avant- mais avec les "arts du cirque" en plus)

Grec et latin gravement compromis au collège malgré les discours lénifiants (il a raison, c'est tellement loin des "nouvelles cultures", des raves, du rap et du roller). La grammaire continue à être proscrite au collège, mais maintenant la littérature le sera aussi au lycée.

Poursuite du jargon dans les textes officiels.

 

Et tout cela, bien sûr, au nom des grands sentiments! Que les nobles aiment donc bien la valetaille!...


 

Nouveau et vu à la télé : Jack Lang!

 

 

Le 27 avril : et voilà : un ministre "médiatique", quelques susucres aux uns et aux autres, et on va chercher à nous faire accepter cela même que le prédécesseur avait voulu; mais avec le sourire, en disant aux profs qu'ils sont des gens très bien : la caresse aux "fayots"...Comme ils seront heureux de rentrer sous l'aile réconfortante de la mère poule ministérielle, après leur petit accès de fièvre anti-conformiste...! Si vous voulez vous faire un petit frisson face à un document qui n'est pas de la science-fiction, allez donc voir une bonne analyse du fait que l'école est censée devenir une"industrie" (ou voir en PDF) ; mais, le dernier numéro en papier glacé du ministère n'insistait-il pas abondamment sur cet aspect?


 

 

POUR FEUILLETER QUELQUES AUTRES SUJETS ABORDÉS :

Le bac , le brevet , le mythe du travail collectif , les disparitions insidieuses ( orthographe, grammaire, concours, documents, travail, svt , Lagarde et Michard, etc...) , les sempiternels nouveaux exercices-gadgets (modules, recherche par internet, groupements de textes et autres "corpus", TPE, vie de classe, etc) , le "grand débat" , les dangers d'une certaine utilisation d'internet pour tricher, et surtout pour remplacer l'école ou la vendre , le jargon à l'école , le latin et le grec, le problème du gâchis de la lecture en primaire (lien vers un autre site), les changements de manuels et d'exercices , le métier contre le pédagogisme , textes récents sur le pédagogisme, poésie , les profs à la casse , les changements de programmes constants, cliquez sur ces titres avant de vous noyer dans mon désordre artisanal. Sinon, tentez le sommaire...

 

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